les yeux doc

Si la Belgique m’était contée…

Archipels Nitrate
Depuis l’arrivée de l’invention des Frères Lumière à Bruxelles le 1er mars 1896, la Belgique n’a eu de cesse de développer le 7ème art. De grands réalisateurs, tels qu’Henry Storck, André Delvaux ou les frères Dardenne, se sont distingués dans l’Histoire du cinéma belge. La vivacité des productions belges permet de découvrir des regards, souvent inédits, sur les êtres et leur environnement. Ce court voyage permettra de montrer quelques-unes des multiples facettes de ce pays qui n’a pas fini de nous étonner.
Une piscine et un réalisateur selon Kita Bauchet

Kita Bauchet vit à Bruxelles. Bains publics nous invite à plonger dans la piscine de Marolles avec la fluidité d’une coulée de natation. Si au dernier étage, le grand bassin accueille baigneurs et nageurs réguliers de tous âges ainsi que des compétitions de natation synchronisée, le rez-de-chaussée permet de prendre une douche pour 2,50 € à ceux qui, défavorisés, vivent le plus souvent dans la rue. La piscine où les voix, les accents, les fragments d'histoire personnelle se répondent telle une partition musicale, est un microcosme essentiel à chacun où l'angoisse du monde extérieur semble entre parenthèses.

Une vie contre l’oubli dessine le portrait d’André Dartevelle (1944-2015), journaliste, réalisateur, historien, grand reporter qui travailla plus de 30 ans à la Radio-télévision belge de la Communauté française (RTBF). De longs extraits de son travail commentés par Dartevelle lui-même documentent la liberté d’approche des sujets de la RTBF des années 1970-1980. Dartevelle, réalisateur engagé et en résistance, est sur tous les terrains pour donner la parole aux exclus et aux opprimés. Ses documentaires indépendants interrogent, à partir de 1990, la mémoire des deux guerres mondiales en Belgique.

En passant par l’école

La Belgique est un bon élève en matière d’éducation spécialisée et d’école inclusive.

La chasse au Snark suit, une année durant, le travail mené au Snark, institution autogérée d’éducation non répressive fondée en 1973 à La Louvières, qui accueille enfants et adolescents en déshérence scolaire atteints de troubles du comportement et de la personnalité. Face à la colère, à la violence, au refus scolaire d’élèves en souffrance marqués par de lourdes problématiques familiales, l’engagement endurant, sisyphéen, des éducateurs tente de donner « un cadre » aux enfants, de rendre leur relation à eux-mêmes comme aux autres, plus apaisée.

Inclusive, tourné dans la Belgique néerlandophone par une réalisatrice flamande, pose un regard intime sur le quotidien de quatre enfants « aux besoins particuliers » qui fréquentent l’école ordinaire. Rosi, Sami, Irakli et Nathan ont des âges et des handicaps différents. En noir et blanc, Ellen Vermeulen observe avec lucidité et tact, les interactions (parfois très contraintes et entravées par le handicap) entre enfants et parents, des enfants entre eux, des enfants avec leur enseignant. Vermeulen montre les effets de l’école inclusive, le défi qu’elle représente face aux préjugés, les possibilités qu’elle peut ouvrir aux enfants malgré, ou plutôt avec, les difficultés à surmonter.

Au tribunal

Comment « vivre ensemble », comment se sortir d’une querelle de voisinage, d’un litige, de ce qui transforme la vie quotidienne en un enfer ? Casus belli emprunte les deux chemins possibles en Belgique : la médiation (action volontariste des personnes impliquées dans le conflit) et l’audience auprès d’un juge de paix. Celui-ci, homme de loi et de proximité spécifique à la Belgique, oriente vers un compromis ou tranche entre les parties. Dans tous les cas, les sentiers de la paix reposent sur une aptitude à l’écoute, la structuration du récit des témoins, l’interrogation des comportements et l’habileté à avancer vers un accord. Si la théâtralité du juge semble être une seconde nature, celle des justiciables repose parfois sur l’effet caméra jouant à plein régime.

Ode aux trésors d’une cinémathèque

Ce voyage s’achève à la Cinémathèque royale de Belgique, matrice d’imaginaires de cinéastes, où s’écrivent tant d’au (re)voir poétiques. Entre érudition et ludisme, « Archipels nitrate parle de cinéma et de temps sous la forme d’une partition visuelle et fait coexister une centaine de films au sein d’un seul et même. »