les yeux doc

Game Girls skydrow

Game Girls

Game Girls suit Teri et son amie Tiahna dans le monde chaotique de Skid Row, quartier de Los Angeles connu pour être la “capitale des sans-abris des États-Unis". Un dilemme attise les tensions entre les deux femmes: s’il semble que Tiahna accepte de faire partie de l’économie souterraine du quartier, Teri est animée par une puissante volonté d’en sortir. Avec d’autres femmes, elles participent chaque semaine à un atelier d’expression artistique, lieu de réflexion, de rêve et de guérison. Leur amour survivra-t-il à la violence de leur environnement, passé et présent ?

C'est l'atelier, initié par la réalisatrice avec le concours d'une dramathérapeute, qui a fait naître et enrichi le projet de film. Très vite, l'attention s'est focalisée sur le couple formé par Tiahna et Teri et leur histoire est devenue le fil conducteur d'une immersion dans ce quartier où la présence des caméras suscite des réactions parfois violentes de la part des habitants. Alina Skrzeszewska, habituée du quartier, a filmé la plupart du temps seule, protégée par Teri qui défend sauvagement "son" film. La caméra accompagne les deux femmes dans les rues, dans les locaux des services sociaux où elles supportent avec confiance les lenteurs administratives, dans leur intimité et lors de la préparation et de la cérémonie de leur mariage, scène d'anthologie qui tient à la fois de la comédie et de la tragédie, où rien ne se passe comme prévu et qui se termine en catastrophe. La violence de Teri, qui se manifeste par des vociférations et des menaces, à l'égard de sa compagne et du monde entier, est le reflet du constat de son impuissance à changer la donne, à sortir du quartier, à s'en sortir. À Skid Row, tout tourne autour de la violence (conjugale, familiale, policière) et de la drogue, qui corrompt et asservit. Le montage du film résume magistralement, en un simple mouvement circulaire, le point de vue de la réalisatrice. Au tout début, Teri est seule et livrée à ses démons: elle attend la sortie de Tiahna, condamnée pour vente de drogue, de la prison. À la fin, c'est Tiahna qui vient attendre la libération de sa compagne. La prison gagnerait toujours ? Soit, mais l'espoir, la volonté et l'amour ont aussi leur mot à dire.

L'avis du bibliothécaire

Christian Magnien
Membre de la commission nationale coordonnée par Images en bibliothèques

Dès l’ouverture, le film nous plonge brutalement dans la nuit de Skid Row, le quartier le plus défavorisé de Los Angeles, où Teri, femme noire très agitée, déambule en défiant les passants. On la retrouve ensuite, apaisée, dans une voiture traversant la nuit jusqu’à la prison où son amoureuse, Tiahna, va être libérée. La fin du film reproduit la même scène inversée, Tiahna récupérant Teri à sa sortie de prison, comme si leurs vies ne s’articulaient qu’entre la rue et la prison. Entre ces deux scènes, l’existence chaotique de ces deux femmes, alternant moments de complicité amoureuse et violentes disputes, existence étroitement entremêlée à la vie de Skid Row, quartier symptomatique de l’état d’abandon moral et matériel dans lequel l’Amérique d’aujourd’hui laisse vivre les plus pauvres de ses citoyens. Le sort des Noirs y est décidément toujours peu enviable comme le rappelle la devinette cruelle d’une vieille femme de la rue : « Pourquoi les noirs font des cauchemars ? Parce que le dernier à avoir fait un rêve, s’est fait descendre. » en écho au « I have a dream » de Martin Luther King. Mais, comme le rappelle une manifestation Black lives matter !, les noirs n’ont pas abandonné leurs combats pour exister et pour sûr, Teri et Tiahna existent pour nous le temps du film.

+ d'infos

Pour aller plus loin, feuilleter le dossier de presse du film comportant un entretien avec la réalisatrice de Game girls Alina Skrzeszewska. ©Vendredi distribution

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