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Premier mouvement de l'immobile - statue © Les films des deux rives

Le Premier Mouvement de l'immobile

Giacinto Scelsi prétendait que les divinités hindoues lui soufflaient directement sa musique à l'oreille. Vers la fin de sa vie, le compositeur italien (1905-1988) enregistre ses mémoires sur bandes magnétiques ; son testament prévoyant leur divulgation quinze ans après son décès. Giacinto Maria Scelsi, Conte d’Ayala Valva revient tel un esprit sous la forme qu'il a toujours privilégiée : l'onde sonore.

Tout petit, Sebastiano d'Ayala Valva était terrifié par les musiques de son aïeul. Devenu cinéaste, il explore les traces laissées par ce créateur énigmatique et solitaire qui se disait messager des sons transmis par la nature et le cosmos. La recherche d’un son habité par une émotion vibratoire ont éloigné le compositeur de l’ambition d’écrire une œuvre susceptible d’obtenir la reconnaissance des musiciens de son époque. La dimension transcendantale de sa musique passe par une approche mystique et exploratoire. Son travail obstiné de textures sonores, de timbres et d’oscillations, fait de Giacinto Scelsi avec Horaţiu Rădulescu, l’un des plus importants précurseurs de la musique spectrale des années soixante-dix.

Interpréter la musique de Scelsi est bien plus qu’une pratique artistique, c’est un rituel très particulier. Pas assez scelsien pour la soprano Michiko Hirayama, le cinéaste aborde néanmoins avec beaucoup de douceur la musique, les interprètes et les proches de Scelsi. Tous ont en commun une sincérité et une liberté dans leur démarche, une volonté de ne jamais considérer leur pratique comme acquise. Ces intercesseurs font surgir l’invisible caché derrière la matière musicale, comme s’ils cherchaient à atteindre la vibration de l’univers.

Alors que le père du réalisateur est au crépuscule de son existence, le film aborde la métempsychose, ou la résurrection de l’âme après la mort. Comme si l’art de Scelsi accrochait les vivants au réel, et fixait le souvenir des êtres dans la matière. Ainsi, le palmier qui s'offre à nos yeux pendant tout le film pourrait être le résonateur du royaume de la musique et du songe des anciens. Le Premier mouvement de l’immobile est aussi un voyage dans le temps.

L'avis de la bibliothécaire

Arlette Alliguié, Bibliothèque publique d'information, Paris
Membre de la commission nationale coordonnée par Images en bibliothèques

Continent inexploré au cinéma, la musique contemporaine recèle nombre de territoires secrets et de personnalités fascinantes. Le compositeur italien Giacinto Scelsi (1905-1988) en est une. Si secret, si mystérieux qu’il fallait un familier, son petit-fils, pour en révéler l’art et l’âme, un étranger serait resté à la porte. Scelsi voulait qu’il ne reste rien de son existence, que seule son œuvre, qu’il disait avoir reçue des dieux hindous, subsiste. Le film fait une large place à l’écoute musicale, l’accompagnant de séquences animées qui agissent comme des images mentales. En l’absence d’archives personnelles, le réalisateur a recueilli les témoignages de ceux qui ont côtoyé Scelsi, de son chauffeur à son fils et aux quelques interprètes femmes qui ont été initiées à cette musique transcendantale. Évoluant entre les arcanes de la technique musicale et le portrait d’un homme peu ordinaire (était-il fou ?), Le Premier mouvement de l’immobile réussit à captiver de bout en bout.

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Pour aller plus loin, consulter le dossier de presse du film. Dossier de presse_SCELSI © LES FILMS DES DEUX RIVES

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