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Nous les filles-mères

Nous, les filles-mères

Le qualificatif de “filles-mères”, appliqué aux jeunes femmes ayant donné la vie en dehors du mariage, peut sembler de nos jours bien désuet. Pourtant, les cicatrices des combats que ces dernières ont dû mener pour élever seules leurs enfants ne sont pas encore refermées ; ceci parce que ces femmes, souvent abusées ou abandonnées, étaient victimes du rejet des hommes, de leur famille et de la société.

La réalisatrice Sophie Bredier, de Nos traces silencieuses (1998) à Maternité secrète (2017) a mené une réflexion profonde et autobiographique sur l’enfance, l’abandon et le sentiment d’appartenance à une origine. Avec Nous, les filles-mères, elle aborde le sujet de la filiation, en se plaçant du point de vue des femmes. Touchant de par sa retenue et sa justesse, le film alterne images d’archives, témoignages face caméra et prises de paroles de spécialistes, notamment Nadine Lefaucheur, sociologue et féministe engagée. Il aura fallu beaucoup de confiance et de courage à celles que l’on appelait avant-hier “filles-mères”, hier “mères célibataires” et aujourd’hui “familles monoparentales” pour accepter de remonter le temps aux côtés de la réalisatrice. Celle-ci donne la parole à diverses femmes que la société a rendues responsables de leur exclusion et de leur invisibilité. La comédienne et chanteuse Camélia Jordana fait ressurgir du passé d’autres voix féminines à partir de textes trouvés par la cinéaste aux archives départementales du Calvados. Le tout nous entraîne dans un voyage tout au long du XXe siècle.

Si Maternité secrète était consacré aux lieux dans lesquels les filles-mères subissaient humiliations et maltraitances, Nous les filles-mères documente de façon très approfondie la revendication des femmes à disposer de leurs corps. De la seconde guerre mondiale à nos jours, aux confins de la sociologie, de la politique et de l’histoire, la réalisatrice parvient à restituer la dimension universelle des trajectoires individuelles et à faire comprendre pourquoi l’expression “fille-mère” est aujourd’hui encore source de colère et d'humiliation. À l'heure où certains pays contestent les droits des femmes, Nous les filles-mères est un message qui s’adresse à tous les sexes et toutes les générations.

L'avis de la bibliothécaire

Marina Mis, Bibliothèque publique d'information, Paris
Membre de la commission nationale coordonnée par Images en bibliothèques

De nos jours en France, imaginer des femmes maltraitées à cause de leur condition de mères célibataires et presque enfermées de nombreux mois dans des maisons maternelles nous paraît digne d’un scénario de science-fiction. C’est pour cette raison que ce documentaire paraît aujourd'hui nécessaire pour rappeler les nombreuses transformations du droit de la famille pendant le XXe siècle et les mettre en parallèle du progrès des droits des femmes. Sophie Brédier, de ses films Nos traces silencieuses (1998) à Maternité secrète (2017) a mené une réflexion parfois personnelle sur l’enfance, l’identité et les origines. Elle aborde ce nouveau sujet sur la famille du point de vue des femmes. Touchant de par sa retenue et sa justesse, Nous, les filles-mères alterne témoignages, prises de paroles de spécialistes et images d’archives. De l'après-guerre à nos jours, aux confins de la sociologie, la politique et l’histoire, la réalisatrice parvient à restituer la dimension universelle des trajectoires de ces femmes sans maris, pour la plupart abandonnées ou violées, et à faire comprendre pourquoi cette appellation de “fille-mère” est encore source de colère et d'humiliation.

+ d'infos

Des sous-titres en français pour les personnes sourdes et malentendantes sont disponibles : cliquer sur la molette en bas à droite du lecteur vidéo et sélectionner Français ou Sourds & Malentendants : Regarder le mode d'emploi des sous-titres

Lire l'entretien avec Sophie Bredier sur Balises, le webmagazine de la Bpi.

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