les yeux doc

On ira à Neuilly

On ira à Neuilly, inch'allah

C’est l’histoire d’une manifestation de jeunes travailleurs de Vélib’ qui apprennent la lutte et tentent de s’organiser. C’est l’histoire d’une joute entre l’image et le son, à travers les rues de Paris, au petit jour. C'est un essai en noir et blanc. C'est un hommage à cet autre film court de Marguerite Duras, "Les Mains négatives", qui mêlait la réflexion philosophique de l'écrivaine aux images d'une ville déserte, émergeant difficilement de la pénombre, presque fantasmée.

On entend l'histoire d'une première grève, celle de jeunes travailleurs de Vélib', le service de location de vélo parisien. On voit Paris en noir et blanc, filmé en 16 mm, au petit matin. On entend la lutte qui tente de s’organiser, avec la langue des quartiers populaires. On voit le parcours de la manifestation qu'ils auraient voulu faire, jusqu'à Neuilly, banlieue riche où se trouve le siège social de Vélib'. Le film interroge deux relations : celle des jeunes des quartiers populaires et leur place dans la société, leur désir de visibilité, et celle tendue entre image et son au cinéma. Ici, le son tient la narration, tandis que l’image porte l’évocation.

L'avis de la bibliothécaire

Marie-Hélène Tomas, Médiathèque intercommunale Gilbert Dalet, Crolles
Membre de la commission nationale coordonnée par Images en bibliothèques

Avec On ira à Neuilly inch’allah, les réalisateurs mettent en place un dispositif sonore très présent. Emporté par un long travelling en noir et blanc, assez lent, dans un Paris désert, au petit matin semble-t-il, le spectateur doit s’accommoder d’une lecture double : celle de l’image d’une part, et de la bande sonore, de l’autre. En effet, ce court-métrage a d’abord été pensé comme un documentaire sonore. La volonté de faire un film à partir du son, le parent pauvre du cinéma, laissera peu à peu germer l’idée d’une mise en image. Mais il nous laissera néanmoins un sentiment de malaise, tant le décalage entre images et bande sonore est grand. Malaise rendu par cette déambulation, parcours fantasmé des grévistes qui traversent Paris depuis les banlieues aux beaux quartiers, lieux de pouvoirs. Film à connotation politique, tout est ici symbole, où le son rend visible l’invisible, où les acteurs de la lutte brillent par leur absence.

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