les yeux doc

Close-up © Tamasa

Close-up

Cinéphile obsessionnel, Hossein Sabzian se fait passer pour un cinéaste afin de convaincre une riche famille de jouer dans son prétendu nouveau film. Écroué pour escroquerie, Hossein Sabzian accepte de rejouer les faits devant la caméra d'Abbas Kiarostami, avec les véritables protagonistes de l'affaire.

Le cinéaste Abbas Kiarostami (1940-1986) عباس کیارستمی travaille à la préparation de son film l’Argent de poche quand il découvre un curieux article dans la revue Sorush. “Hossein Sabzian n'est pas un escroc. Il est habité [...] Ce qu’un réalisateur de films peut faire pour lui, c’est le réhabiliter, faire un portrait de lui en tant que jeune homme amoureux de cinéma.” Nul besoin de connaître le système judiciaire iranien, ni le cinéma d’Abbas Kiarostami pour apprécier cette savoureuse déclaration d’amour faite au cinéma. Derrière la chronique judiciaire ou le film de procès, se cache une mise en abîme vertigineuse des faux-semblants du réel et de son double tricheur, le cinéma.

En mêlant le vrai et le faux, l'artifice et l’authentique, le (re)joué et le pris sur le vif, Kiarostami raconte l’histoire d’un imposteur profondément esthète. Convaincu comme Tolstoï que “l'art est une expérience sentimentale que l’artiste développe en lui-même et transmet aux autres”, Hossein Sabzian livre au fur et à mesure du procès une confession déchirante. Interrogé par Kiarostami, il divulgue petit à petit comment et pourquoi il s’est forgé un personnage, comment il est devenu un comédien. Quand soudain, au détour d’une question, Sabzian découvre sous nos yeux la nature profonde de son expérience. À ce moment de bascule, le cinéaste - le vrai - accomplit son épiphanie : “tu en es arrivé à ton propre rôle”. Rarement, le cinéma sera parvenu à s'approcher au plus près de la vérité d’un homme. Il en est sans doute pour Close-up comme pour beaucoup d’autres chefs-d'œuvre du cinéma, notamment documentaires. Le spectateur doit patiemment attendre que le réel fasse irruption, pour ressentir toute la puissance révélatrice du cinéma, une puissance capable de changer le sens de la vie.

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Pour aller plus loin, écouter le podcast Regards critiques avec Jean-Louis Comolli sur Balises, le magazine de la Bpi.

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