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Paysages résistants © Bocalupo Films

Paysages résistants

Pejzaži otpora

"Paysages résistants" plonge dans les souvenirs d’une combattante antifasciste, Sonja Vujanović (97 ans), une des premières femmes Partisane de Yougoslavie, qui fut également une des chefs de file du mouvement de Résistance au camp d’Auschwitz-Birkenau.

Son histoire voyage à travers le temps et s’incarne dans une nouvelle génération antifasciste, entretenant l'idée qu’il est toujours possible de penser et de pratiquer la résistance. Si Paysages résistants nous fait rencontrer et aimer Sonja, qui fit partie du mouvement des Partisans de Serbie (résistants communistes dirigés par le Maréchal Tito) et témoigne ici de son parcours extraordinaire, sa mort est annoncée dans le film sans dramatisme aucun. Ce parti pris est révélateur de la démarche de Marta Popivoda : raconter une histoire du vingtième siècle, mais en gardant les yeux ouverts sur le présent. Dépeindre un être dans toute sa singularité, pour mieux le faire résonner en nous. Il s’agit de tirer une inspiration, au sens le plus fort du terme, de la façon dont Sonja a, très tôt, commencé à lire des ouvrages «progressifs», avant de s'engager contre les Nazis sans jamais perdre courage, même à Auschwitz.

La réalisatrice construit un écrin pour le récit précieux de la vieille dame. Le rythme de son montage s’aligne sur le débit doux et lent de sa voix: les images se fondent les unes dans les autres au gré de magnifiques fondus enchaînés. Ces plans au présent font s’entrecroiser le monde domestique, les lieux de mémoire et une nature paisible, qui fait écho au formidable instinct de survie de la résistante. Apparaissent aussi en transparence des extraits d’une correspondance qui précise peu à peu la relation de la réalisatrice à la protagoniste, écrite par celle qui est le point de jonction entre les deux femmes – petite-fille de l’une, compagne de l'autre. Le cheminement parallèle des trois personnages, sur plusieurs années et par-delà la mort, mène à une conclusion qui tombe sous le sens: il n’est pas nécessaire d’être héroïque pour être des Partisanes ; nous nous devons d’être des Partisanes.
[Extrait du catalogue Cinéma du réel 2021]

L'avis de la bibliothécaire

Carole Vidal
Membre de la commission nationale coordonnée par Images en bibliothèques

« Les larmes sont une raison puissante de faire un film politique ». Et construire l’histoire par les témoins elles-mêmes, un moyen efficace. Sonya va raconter son parcours de militante, de résistante, à deux jeunes féministes, activistes du temps présent dans les Balkans contemporains. Les deux militantismes vont se croiser, se répondre, s’alimenter, bien sûr. « Entre son communisme et notre marxisme culturel, le fascisme de son époque et le néo-fascisme de la nôtre » va se construire une complicité politique et sororelle.

Elle débute alors le récit de sa vie : partisane communiste dans la Yougoslavie en 1941, soldate active, emprisonnée au camp de Banjica avec 108 autres résistantes puis déportée à Auschwitz-Birkenau. C’est un point de vue de femme, contrepoint de la macro-histoire, souvent patriarcale. Où on apprend ce qu’avoir ses menstruations, perdre son amoureux, se battre ensemble ou même tuer peut avoir comme effet dans la guerre. Et comment la lutte collective active les solidarités et les bienveillances.

+ d'infos

La discussion avec la réalisatrice Marta Popivoda à la fin de la projection en ligne du film pendant Cinéma du réel #21

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