Motu Maeva
Un portrait de Sonja, aventurière du XXème siècle, habitante d'une île qu'elle a elle-même façonnée : Motu Maeva.
Motu Maeva commence par une série de plans sur la végétation foisonnante et humide d’un jardin. Nous voici invité·es à prendre le temps et à respirer, dans ce lieu étrange et verdoyant tenant du symbolique. Est-ce un havre de paix ou sommes-nous passé·es de l’autre côté du miroir, dans le territoire brumeux des rêves ? Au cœur de cette jungle, émerge une figure presque mythologique : Sonja André, dame d’un certain âge, très vive et volubile. Elle commence à raconter son histoire, qui paraît imaginaire jusqu’à ce que des images surgissent, archives de sa jeunesse, donnant corps à ses souvenirs.
Son récit s’articule autour du bonheur de ses voyages à Tahiti, au Tchad et à travers le monde en compagnie de son mari, Michel, envoyé ici ou là pour le travail. Ces temps de rencontres et de plaisirs sont opposés aux blessures de l’enfance et à la relation entretenue avec sa mère, évoquées à plusieurs reprises mais toujours laissées dans un voile de mystère. La narration, ni linéaire ni explicative, invite à s’abandonner à cette matière flottante faite d’images, de mots, de sons et de silences, où le sens se tisse plus qu’il ne s’impose et dont il faut démêler les fils.
Maureen Fazendeiro, réalisatrice travaillant entre Paris et Lisbonne, a agencé à la colleuse les fragments en Super 8 de l’existence de Sonja : elle a découpé et assemblé la pellicule, réinventant son passé sur la table de montage. Son geste cinématographique épouse ainsi le fonctionnement associatif et imparfait de la pensée et des souvenirs. Quelles traces une vie laisse-t-elle ? Quelques images, quelques objets et quelques mots, que la cinéaste nous fait parvenir comme s’ils étaient issus d’un trésor enfoui ou d’un monde oublié.