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La Lumière des rêves © Sanosi

La Lumière des rêves

À la rencontre de Michel Jouvet, découvreur du sommeil paradoxal et chercheur passionné par l’étude des rêves, La Lumière des rêves est un portrait de son monde intérieur, des enjeux de sa recherche scientifiques et des drames qui ont marqués sa vie.

Michel Jouvet, mondialement révélé en 1959 par sa découverte du sommeil paradoxal, se plonge au crépuscule de sa vie dans ses cahiers de rêves, de dessins et de recherches. Une matière foisonnante qui anime peu à peu un portrait intime de ce neurobiologiste et onirologue, convaincu que les rêves sont les gardiens de la singularité de notre identité. Presque intégralement filmé dans le bureau de Michel Jouvet quelques années avant sa mort, La Lumière des rêves explore pas à pas cet espace exigu aux airs de cabinet de curiosités, chargé de bustes de provenances diverses, d’animaux empaillés, et surtout de carnets. C’est à travers eux que l’histoire de cet homme se raconte. Ils rassemblent des récits de rêves au contenu fantastique, sexuel ou morbide, des dessins colorés les illustrant, des schémas utilisés pour expliquer l’étrange phénomène du sommeil paradoxal. Pour alimenter ses recherches, le Professeur analysa sa propre matière onirique. Il en tira des données statistiques destinées à mieux comprendre la relation entre rêves et émotions. Il étudia la fréquence de ses divagations nocturnes, et notamment celles où figurait Danielle, sa première épouse, suite à sa mort prématurée.

Deux anciens collègues rendent visite à Jouvet dans son antre, réveillant de vieux souvenirs. Les liens se tissent peu à peu entre les songes que nous découvrons et l’histoire d’une vie qui se raconte dans le désordre, en respectant le caractère anarchique de la mémoire. Le rêve d’une autopsie par des chats prend tout son sens lorsque l’on apprend que ces félins furent des cobayes de choix. Marie-Pierre Brêtas s’inscrit dans ce récit en déchiffrant elle-même certains carnets ou en s’amusant à faire apparaître sur les murs du cabinet des figures lumineuses qui s’animent. Une continuité s’établit entre les rêves de l’un et ceux de l’autre, témoignant de la force motrice de courants souterrains.

(Extrait du catalogue Cinéma du réel 2022)

L'avis du bibliothécaire

Philippe Chenieux, Pierres Vives - Médiathèque départementale de l'Hérault, Montpellier
Membre de la commission nationale coordonnée par Images en bibliothèques

L’on doit au neurobiologiste Michel Jouvet la découverte du sommeil paradoxal et, plus largement, un important travail scientifique sur la formation des rêves, dans une approche strictement biologique. Si cette matière est bien au cœur du projet de Marie-Pierre Brêtas, la réussite du film réside dans le dépassement de la forme classique du portrait. Le bureau de Jouvet, incroyable décor-cerveau, justifie que l’on n’en sorte quasiment pas. Son étonnante œuvre graphique, abondamment restituée à l’écran, révèle, derrière le savant, un véritable artiste. Relevons enfin que le film prend, avec la malicieuse complicité du scientifique lui-même, disparu en 2017, une émouvante dimension testamentaire. Bien plus qu’un portrait donc !

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